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         Désirs





(Photo Philippe Boussion)


        Les désirs sont des rages qui nous mutilent.

        Pourtant j'ai tendu mes bras vers des amitiés et posé mon cœur sur ce point d'équilibre ou se reposent les amours.
        J'ai jeté mes livres comme des feuilles mortes et j'ai laissé croître en moi les prairies suaves des mots.
        Mes lèvres ont bu sur des peaux ensoleillées et les racines de mes doigts ont sucé la lave des corps.

        Pourtant j'ai trempé mon corps aux commissures des fontaines où poussent les mousses et les fougères et j'ai bu des vins sombres comme les caves où ils mûrissent dans leur bois tannique,
        Et les abeilles de mon corps, comme une ruche bourdonnante ont léché le miel des sourires, des innocences et des rêves.

        Pourtant la guerre est venue à moi et j'ai embrassé la guerre.
        La guerre est une faim qui tourmente les ventres lorsque les nourritures sont des mots, des idées, des notes et les plats des mélanges de couleurs et de chants d'oiseaux.
        Ma faim m'a emmené vers des plaines perdues, des abysses et mes dents se sont usées sur le corail rouge des cruautés.

        Aujourd'hui mes appétits ont des incertitudes,
        J'entends les sanglots de ma porte qui s'ouvre sur la mort.