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         Hiver








     L'hiver est un gros chien qui pose son museau à la cheminée. Chien fidèle grondant aux tempêtes qui giflent les volets, l'hiver est une histoire usée aux confins d'un blanc décor. Il est la racine des coassements aux noirs sapins quand les mains grelottent aux fonds des poches.

     A l'envolée des aurores grises sur de lointaines églises, l'hiver fume ses insomnies aux feux des villages et cache ses folies sauvages sous de craquantes banquises. Pauvres plumes recroquevillées sur le berceau des branches, les moineaux frileux se blottissent aux miradors bleus des nuits.

     Reflets d'un vieux banc au miroir de la neige avec des restes de flocons d'amour posés sur la lumière gelée de la lune. L'hiver est une lame acharnée qui rougit les blessures sanglotant au creux des poitrines. En écoutant le Filiae Maestae Jerusalem de Vivaldi il jette ses frissons sur les oiseaux de décembre.

     L'hiver, il neige sur les espoirs des herbes fantômes qui ont au cœur le cri triomphant de l'écho du froid. Agonie des jours, froids effilés, glaces barbares, pourtant la nature est attentive aux chemins immaculés et offre sa main ouverte aux rêves égarés. En dansant sur les buttes abruptes des nuages qui fabriquent les flocons du ciel, l'hiver grave ses printemps sur le cœur des montagnes. Il se penche aux magies qui se cachent sous les voûtes des torrents figés.

     Le souffle de l'hiver créé par sa propre violence met ses pas vers les portes de la lumière. Il marche devant des instants révolus, ombre des séparations et des regards perdus, saturation des empreintes du gel, souvenirs aux mille murmures des vieux chemins. L'hiver est l'annonce d'un temps autre au bout d'une nouvelle frontière. L'hiver conçoit le printemps.

     L'hiver est une candeur jaune et bleue qui danse dans la cheminée près d'un gros chien endormi. Flamme qui lèche et qui mord. Flamme d'une chair d'hirondelle demain régénérée. L'hiver souffle aussi le chaud dans nos poches.


Ecouter Filiae Maestae Jerusalem