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          Le vieil arbre








        Il y a un vieil arbre à la fontaine, près de la maison en ruine.
        La lumière qui se lève sur les reflets argentés de sa peau fripée est une auguste caresse. Elle fait taire ses maux de vieux bois et tous les vacarmes de sa sève fatiguée.
        Suppliques d'un temps hors des pierres écroulées pour que la vieillesse ridée séduise encore.
        Le vieil arbre nous ouvre ses branches comme les accueillantes portes d'un temple en dentelle. Silence intime qui traîne la présence muette des chats et des insectes.
        Transhumance de l'âge, inquiétudes du temps, songes d'un arbre aux échos d'une fontaine indulgente. Les pierres sommeillent sous le vertige du feuillage.
        Vestige de futurs murmures. La graine obscure parle semaison avec l'absinthe d'une eau verte. Défaire ses voyages, brûler sa barque, oublier ses errances puis vivre en l'autre. Brisures de cœur, débris d'un trouble vif. Fleur égarée vers le repos éternel, un pétale trébuche.
        Un vieil arbre soupire au seuil disjoint d'une maison éboulée. Il regrette l'ardente demeure près de lui, les murmures derrière les contrevents, le rire des enfants, la chair de la femme. Silence des souvenirs bruyants. La pierre est partie au sommeil dans les jours de chaos où la terre perd ses empreintes.

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        Quand l'arbre pleure sur les pierres
        Quand l'arbre est gris
        Quand l'essentiel n'est plus rien


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        Il y a un vieil arbre à la fontaine, près de la maison en ruine.
        Rêves effrités, comme les pierres dans ses maux. C'est le temps où la racine devient prison.
        La beauté s'écrit dans un feuillage antique et la branche qui choit au sol en est la signature. La nature est la vie d'une poésie sans fin. Esquisse du temps et de la solitude à deux pas de l'agonie.
        Franchir le seuil du temps, sans hésiter, pour y trouver des splendeurs audacieuses.
        Un vieil arbre croise ses mots à la vitesse d'un escargot. Jadis a toujours été trop tard. Pourquoi remettre ses pas dans les foulées d'avant ? Changer de monde, écouter ses yeux, échanger ses billes contre de lentes conversations.
        Un vieil arbre nous dit au revoir mais il n'éteint ni ses couleurs, ni ses douleurs. Il va simplement vers ses mauvais jours dans l'effervescence d'un absolu silence.

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        Dans la douceur de l'émotion
        La vie est parfois un tableau
        Et la solitude un art


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        Il y a un vieil arbre à la fontaine, près de la maison en ruine.
        Partage au fond des cœurs, confidences aux surfaces des lèvres, chants d'oiseaux aux préludes des figues. L'obscur soupire sur la zébrure des vieux troncs. Le temps éclabousse le sourire du soir. Un vieil arbre nous raconte ses légendes. Tête à tête avec ses ruines flamboyantes. Émotions jusqu'à l'aveuglement. Notre cœur palpite aux gifles du temps.
        Écouter loin des hommes le murmure intime d'un vieil arbre. Se laisser brûler par le soleil de son écorce qui nous chante demain. Aller vers les chemins âpres de ses douleurs, vers ses aventures crépusculaires.
        Un vieil arbre monte aux ramures de ses rêves puis retourne aux lisières de ses racines. Sisyphe déchu, si près de l'envol. Dissonance complice de nos caresses au terme de l'âge. Mais que sait-on de lui dans son silence souverain ? Peau tannée qui boit le soleil, morsures cruelles aux genoux de nos enfances quand nous grimpions à cette cathédrale, voilier de nos grands voyages quand le loin habitait nos esprits. Ne jamais se rassasier de telles ardeurs. Ne plus jamais vieillir au déclin.

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        L'arbre, la pierre, la terre et nous
        Nous élaborons notre devenir
        Unis par les mêmes racines


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