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         Jeanne Humbert


             (1890-1986)

             Le planning familial pour la paix.



    Les entreprises mobilisent jusqu'à l'indigestion leur chair à canon. Leurs étals débordent.
    La guerre et la mort sont deux amies pétulantes qui aiment à danser sur les charniers de leur coterie.
    Les gouvernants, la guerre, les entreprises, la mort.
    Et les bêlements des peuples sous ces mers de sang.
    Et des ventres qui ne veulent pas enfanter les armées des guerres, les marchandises des marchés, les nourritures de la mort.
    Et des ventres libres qui crient leur refus des souffrances programmées.

    Le 24 janvier 1890, naît Jeanne Humbert à Romans sur Isère dans la Drome. Elle passera son enfance dans les milieux anarchistes et deviendra l'élève de Eugène Jean-Baptiste Vigo (1) (père de Jean Vigo (2) qui lui apprendra la sténographie.
    C'est là aussi qu'elle fera la connaissance d'Eugène Humbert, son futur mari. Ils auront une fille en 1913.
    C'est dans ce milieu libertaire qu'évoluent les thèses de Malthus, revues cependant par ceux que l'on appelle les néo-Malthusiens, tels que Paul Robin, Octave Mirbeau ou Marie Huot.
    A l'époque, tous les néo-malthusiens étaient contre la guerre et donc antimilitaristes.
    Jeanne fut membre de la Ligue internationale des Combattants de la Paix qui deviendra par la suite l’Union pacifiste.
    Elle collabore aux journaux d'Eugène Humbert, «Génération consciente» et «Grande réforme».
    Durant la guerre 14-18, Eugène Humbert, déserteur, s'expatria en compagnie de Jeanne.
    En 1920, les natalistes firent voter une loi scélérate : «Sera puni quiconque, dans un but de propagande anticonceptionnelle aura divulgué des procédés propres à prévenir la grossesse» (3)

    Eugène sera condamné à 5 ans pour insoumission et propagande anti-nataliste et Jeanne à deux ans.
    A leur sortie de prison, en 1924, ils se marièrent afin de faciliter les visites en cas d'emprisonnement. Ils firent la connaissance de Marcel Kienné de Mongeot, théoricien du naturisme.
    Jeanne écrit alors "En pleine vie" un roman qui s'appuie sur les thèses néo-malthusiennes et naturistes.
    En 1930, Jeanne parcours la France pour y donner des conférences sur le contrôle des naissances et sur le pacifisme.
    Son mari, Eugène, sera de nouveau emprisonné pour propagande anticonceptionnelle en 1944, et, rattrapé par la guerre qu'il a toujours condamné, il perdra la vie, la veille de sa libération, au cours d'un bombardement allié sur l' hôpital d'Amiens, où il est soigné.
    En 1951, elle participe aux côtés de Félicien Challaye et Émile Bauchet à la fondation du Comité National de Résistance à la Guerre et à l'Oppression. Comité qui deviendra l' Union Pacifiste de France en 1961.
    En 1974, elle rejoint May Picqueray qui fonde «Le Réfractaire».


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Jeanne Humbert (4)


Des corps à manger, des corps comme des machines
Des corps pour la vanité des empires technologiques
Des corps pour le grand destructeur. Le grand incinérateur
Des corps plongés dans les fonderies de la guerre
Des corps pour le capitalisme et ses présidents violeurs.


Les nations déroulent leurs tapis rouges pour les cadavres
Les nations ouvrent leurs paupières acides sur les étreintes guerrières
Les nations serrent leurs dents mauvaises sur les abattoirs de l'horizon
Les nations regardent les lèvres de la douleur dans le couchant
Les nations écoutent les souffrances de l'âme dans le lointain.


Et Jeanne Humbert pour nous parler de l'autorité funeste
Et Jeanne Humbert pour nous montrer les grandes propriétés privées
Et Jeanne Humbert qui se dresse contre ces cicatrices qui grondent.
Et jeanne Humbert traquée par les meutes du moloch
Et Jeanne humbert debout dans ces outrages foudroyants.


Lorsque les empires de la mort ne pousseront plus leurs cris
Alors les aubépines viendront soigner nos fièvres et nos peurs
Glas sur la guerre ! Qu'elle use ses semelles vers le néant
La foi dans ses mains est une pure folie, ses vagues sont noires
Nos chairs ne lâcheront plus rien contre ses ordres vénéneux.


Et maintenant Jeanne Humbert
Le dernier feu, la dernière morsure, le dernier effroi
Les dernières cendres, les dernières brèches dans les corps.
Et maintenant, Jeanne Humbert
Des rafales de fleurs sur nos empires d'amour
Des essaims de rêves à l’haleine profonde de la vie.



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  (1) Appelé Miguel Almereyda
  (2) Le réalisateur
  (3) La propagande pour la limitation des naissances est restée interdite par la loi française jusqu'en 1967
  (4) Voir le film de Bernard Baissat https://www.dailymotion.com/video/xwjap2