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          Théodore Monod


            (1902-2000)

              Les sables de la paix.



    Avant d’être marathonien des sables, Théodore Monod était pêcheur de fossiles vivants. Carcinologue (1) et ictyologue (2) il fut le premier à descendre dans le bathyscaphe avec le professeur Picard.
    Théodore Monod fabriquait ses découvertes dans le chaudron de son intelligence. Il découvrit les cernes sur les écailles de poisson qui permettent d’estimer leur âge comme avec ceux des arbres.
    Sans lui quelques espèces de crustacés seraient restées inconnues.


    Quand il découvrit le Sahara il eut une révélation. Sa vie serait moniale. Il jeta donc la «quincaillerie de ses pensées» dans cet océan de dunes et se fît dune parmi les dunes.
    Le désert devint sa deuxième épouse. Marié à la roche et aux fleurs il était l'ascète du Sahara. Il se nourrissait de sable, se désaltérait dans l'infini du ciel et suçait les cailloux comme une friandise.


    Théodore Monod se déplaçait à dos de montagne, courbé sur son bâton. Il était navigateur au long cours marchant au rythme lent du pas de ses chameaux (3). Il fit de la lenteur l’outil de sa connaissance. La lenteur était son œil. Il traversa le Majâbat-al-Koubrâ qui s'étire sur mille kilomètres sans point d'eau. Il fût le premier homme depuis le néolithique à s'aventurer dans cette traversée hauturière.
    Théodore Monod était un anachorète. Il prenait un peu d'eau et quelques poignées de riz, des dattes puis partait pour quelques centaines de kilomètres dans le désert.
    Théodore Monod aimait les fleurs et les fleurs le lui rendaient bien. Dans son herbier se trouvent quatre mille huit cents références dont la Monodiella flexuosa, découverte dans le Tibesti, une gentiane très rare qu'il n'a jamais retrouvée depuis.


    Il pratiquait le jeûne comme on respire. Chaque année, à Taverny, il venait jeûner quatre jours à la mémoire d' Hiroshima et de Nagasaki, ces glorieux faits d’armes de nos civilisations, ces douces plaisanteries de nos sociétés modernes.


    Théodore Monod était un enfant de la nature. Le cœur des animaux battait dans sa poitrine et la sève des fleurs coulait dans ses veines.


    Il mourut à quatre vingt-dix-huit ans et depuis le désert compte un grain de sable supplémentaire.


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Théodore Monod


La grande création emplie d’amour.
Et Théodore juste au milieu
Qui creuse le cœur d’un bonheur suprême.


Théodore est connecté avec le désert
Ses conversations avec le sable sont silencieuses
La nature est son calendrier.


Théodore aime propager son existence
et celle des millions de grains de sable.
Il est l’esprit qui parle paisiblement.
Les étoiles se nourrissent de ses mystères.


Les chameaux de Théodore sont des crayons
qui écrivent les jours des solitudes
Et les rêves de joie.
Ils sont les livres des déserts d’Afrique.


Solitaire dans ses vieux linges de sueur
Théodore est marié à l’amour.
La félicité est une modeste maison
Qui plonge dans l’éternité.



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     (1) Étude des crustacés
     (2) Étude des poissons
     (3) Théodore Monod appelait chameaux les dromadaires